Photorama 21 avril 2013

Véronique Errera, Mafalda da CamaraRomain Fiorucci-Lutaud

Véronique Errera

 25 ans après, où en sommes nous ?

 

 Encouragée par mon entourage, c'est la première fois que j’expose ce reportage.

Les prises de vue datent de 1988 mais elles nous ont curieusement semblé toujours d'actualité.

Cela m'a beaucoup questionné, voire exaspéré, de constater que la question du mariage pour tous puisse encore faire débat aujourd’hui. Nombre d'autres pays se sont naturellement adaptés en faisant évoluer leurs lois sans que cela ait fait l’objet d’une récupération politique quelconque divisant dangereusement l'opinion publique.

A qui cela profite-t-il ?

Quelle est la version originale de l'amour ?

Qu'en est-t-il du mariage tout simplement ?

Qu'en est-t-il du statut de l'épouse ?

Qu'en est-t-il de la parité ?

Qu'en est-t-il de la politique ?

Qu'en est-t-il des croyances ?

Qu'en est-t-il de l'évolution anthropologique de la société ?

...

Dans le règne animal on trouve toutes formes de vie sexuelle. Par exemple, des scientifiques ayant observé et étudié les mouettes rieuses, ont constaté que l'homosexualité est courante chez cette espèce et que quand un œuf se trouve en danger suite à la disparition de ses parents naturels, il est souvent sauvé par un couple homosexuel. Ils le couvent pour ensuite nourrir et élever le petit.

On ne se pose pas la question de savoir si c'est normal ou pas. On dit que c'est une belle leçon d'amour et d’humilité. Et c'est... naturel!

Je n'avais pas prévu de faire ce reportage. Je suis arrivée à San Francisco en vacances avec mon compagnon. Le lendemain matin on a décidé d'aller flâner à la découverte de la ville sans programme pré établi. En arrivant dans le quartier Castro on est tombé sur un festival de couleurs, de joie, de vie et de gentillesse. J'ai presque malgré moi été irrésistiblement poussée à "couvrir le sujet", quand bien même je n’avais pas du tout le matériel adapté à la lumière et au sujet. J'avais mon Nikon FE avec un 85mm et une pellicule Kodak gold 200 entamée à l’intérieur. Dans mon sac j'avais encore une Kodak gold 200 et une HP5.

Je crois que je suis une rapporteuse d'émotions!

Merci à « Vol de nuit ».

Merci à tous ceux qui ont contribué aux instants rares.

Merci à tous ceux qui m'ont supporté, écouté et encouragé.

Merci, merci, merci à Santi Oliveri.

Merci, merci, merci à toute l'équipe de Rétine argentique.

Merci à Isalinde Giovangigli, amie et bonne fée de toujours !

Qui suis-je ?

Je suis toujours un peu embarrassée quand on me pose la question: d'où viens-tu? Si je devais répondre simplement, je dirais : « de nulle part, comme la plupart d’entre nous, je suis apatride, faite de bric et de broc ». Cela fait sourire bien sûr... Alors développons

(Éloge d'une fuite):

Acte 1 : Du côté de mon père…

Mon grand-père est né en Sicile, ma grand-mère à Malte, ils se sont rencontrés en Tunisie où mon père est né et a été élevé.

Acte 2 : Du côté de ma mère…

Mon grand-père est normand, ma grand-mère bretonne, ils se sont rencontrés à Nantes où ma mère est née mais n’est pas restée puisqu’elle a passé son adolescence en Egypte.

Acte 3 : C’est là que j’interviens…

Mes parents se sont rencontrés à Toulon où je suis née mais pas restée non plus. Périple de 2 ans à Bangui en Afrique Centrale avant de gagner Johannesburg, puis Vereeniging en Afrique du Sud où j’ai été élevée un bon moment. Scolarité en anglais en pleine époque de l’apartheid. Et puisqu’on en parle, à 12 ans, le contexte politique s’étant considérablement dégradé, on me renvoie en urgence et seule chez ma grand-mère à Aix-en Provence. Ma mère rentrera 1 an plus tard, et mon père encore 1 an après. Résultat du loto gagnant : au collège, où je parle très mal le français, je deviens « l’africaine ». Numéros complémentaires : mes parents divorcent.

N’étant pas d’une nature sédentaire (ha bon ?), à 19 ans je quitte le foyer familial. Pendant les 13 ans qui suivent, en ayant comme bases Paris et New York, je fais de nombreuses escapades dont les plus marquantes au Danemark, au Maroc, en Espagne, à Nantucket, à San Francisco, en Martinique et j’en passe…

En 1995, je m’installe à Marseille et, miracle, j’y suis toujours ! Mon fils y est né ET resté !

Cela fait 18 ans que je vis à Marseille; alors serais-je Marseillaise? Ou est-ce que je maintiens apatride?

Qu’ai-je fait ?

Mon parcours professionnel me ressemble.

Je découvre la photographie à 14 ans en cours d'art plastique au collège. Et ça a été un vrai coup de cœur ! J’étais piquée quoi !

Du coup, je m’inscris à l’atelier photo d’une MJC où j’ai la chance de tomber sur un passionné plutôt pointu qui m'enseigne toutes les bases. Dans ce même lieu, je suis aussi des cours de théâtre.

(Pourquoi est-ce important ? On en parle plus tard.) Mais revenons à nos moutons. Un jour le grand frère d'une amie décide de vendre l'équipement de son petit labo noir et blanc. Je réunie toutes mes économies et l'achète, au grand désespoir de ma mère. Pour mes 16 ans je réussie quand même à me faire offrir un Nikon FE par ma grand-mère. Mais malgré mes efforts, ma famille ne veut pas que je fasse des études de photos.

Alors je coupe le cordon, monte à Paris, commence à faire des petits boulots alimentaires tout en suivant des cours de théâtre. Ce moyen d’expression me permet de prendre un peu plus confiance en moi et m’aide à me structurer d’avantage quant à ma relation à l’autre. J’y découvre des auteurs qui sont devenus autant de points de repère. Et j’y rencontre beaucoup de comédiens pour lesquels je fais des books photos.

A 22 ans je rejoins mon compagnon à New York où il est installé depuis 6 mois. On y restera plusieurs années. Là bas je continue théâtre et photo. C’est d’ailleurs pendant cette expatriation que nous sommes allés à San Francisco.

De retour en France, je retrouve un ami avec qui j'avais fait du théâtre. Il travaille pour le magazine « Point de Vue Images du Monde » et cherche quelqu'un pour le remplacer dans le labo où il fait des reproductions de documents originaux trop fragiles pour pouvoir être envoyés chez l'imprimeur. Je fais mon remplacement et ai la chance d’y rencontrer des gens qui s’intéressent à mon parcours. Entre le fait que je sois bilingue et mes compétences dans le domaine de la prise de vue, ils me proposent de m’embaucher à faire des reportages la moitié du temps et d’occuper l’autre moitié de ce temps à développer le service iconographie. C’est ce que je fais pendant quatre ans. J’obtiens ma carte de presse et en parallèle, avec leur soutien, je suis une formation « Prise de vue Grand format » à l'Ecole Louis Lumière, une petite part de rêve qui se réalise.

A la suite de soucis de santé, étant complètement immobilisée, je me vois dans l’obligation d’arrêter. C’est un ami photographe qui reprend mon poste. Lorsque ma santé me le permet à nouveau, je recommence à travailler et trouve un emploi d’iconographe pour l'agence Magnum Photos. Là, je rencontre quelques « grands » photographes comme Koudelka, Abbas, Martin Parr, Martine Franck, Gilles Peres, Guy Le Querrec... Dennis Stock pour qui je numérise une bonne partie du travail, notamment les photos prises durant le tournage de « Misfits » qui me touchent beaucoup, allez savoir pourquoi. Dans le « frigo » je me retrouve à mettre un peu d'ordre dans les négatifs... Capa, Cartier Bresson, Elliot Erwitt... Quel honneur! Quel bonheur !

La photo était en pleine mutation, on commençait à passer laborieusement au numérique et ce n'était pas très convaincant. Pause.

En rendant visite à des amis à Marseille, je tombe amoureuse de sa lumière et décide de m'y installer. Une occasion de suivre une formation multimédia à l'Ecole de Journalisme et de Communication se présente et m'offre la possibilité de m'accoutumer aux nouvelles technologies pour finir par me transmuter en infographiste. Des aléas de vie m'amène à devoir mettre la photographie entre parenthèses pendant une dizaine d'années pour assumer un job alimentaire et élever mon fils. Mais chassez le naturel...

Les parenthèses finissent souvent par tomber, heureusement ! Je décide enfin de m'inscrire dans un club photo «Vol de nuit», j'y rencontre Santi Oliveri qui découvre mon travail et m'encourage à renouer petit à petit avec ce qui depuis toujours m’anime. Il me semble qu’un photographe reste un photographe, même sans appareil, même sans avoir de temps pour des raisons purement matérielles, on en reste néanmoins des « voleurs d’instants rares ». Combien de photos faites uniquement avec ma tête ?

Santi me fait connaître « Rétine argentique ! » et nous sommes là aujourd’hui.

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Mafalda da Camara 

ante-room est une sélection d'images ou la prise de vue et les manipulations en chambre noir sont au service d'univers oniriques comme un dispositif pour capter l'invisible et retranscrire des fragments de moments juxtaposés entre rêve et réalité.

I had my 1st camera, a Kodak Instamatic at the age of 8.

It started a practice that has been with me through out my life and it all started in black and white.

Photographing has been a way to assemble memories, register the impression of the world onto me, as well as fragments of moments juxtaposed between dream and reality, a mirror, a device to capture the invisible, a subjective document tool or objective archival material. 

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Romain Fiorucci-Lutaud

 

J'ai passé toute une soirée à photographier un boxeur. Du vestiaire jusqu'au ring, j'ai découvert un monde de dualité où la solitude finale du combattant effleurait sans cesse l'amour de sa famille. Le père le recoiffe et dans ses yeux, ses mots, ses gestes, de la fierté partout. Dieu aussi. Autour de mon boxeur et de sa famille, le public regarde des gladiateurs se déchirer mais semble n'avoir d'yeux que pour le spectacle surhumain haut en couleurs. J'ai choisi le noir et blanc pour cette violence frappée d'amour. Pour l'envers apaisé d'un décor brut. Pour ce paradoxe invisible. De ma quarantaine de photographies faites ce soir-là, mes plus ratées sont celles sur le ring. Pendant les combats. Je n'y ai perçu que de la force et du respect. Ce que je savais déjà. Plus tôt, dans les vestiaires, j'ai aimé beaucoup plus apprendre que cette force avouait, discrètement, se croiser avec la douceur d'un baiser fraternel.

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