Lire à tout prix

Mathieu Do Duc

 Depuis mes débuts photographiques, je n'ai eu de cesse de photographier les Gens qui lisent. «Ceux qui lisent », une espèce de tribu comme dirait le héros de BD Rahan de mon enfance. Sur mes clichés pris sur le vif, ils ou elles, jeunes ou moins jeunes lisent dans la rue, dans le métro, dans le parc, dans l'avion, et bien d'autres lieux parfois insolites, d'autres fois convenus. « Ce qu'ils lisent » m'intéressait également : le journal, un livre de poche, un magazine, une publicité, un guide de voyage, un plan... Ils sont souvent seuls mais œuvrent parfois à deux voire plus.

Aujourd'hui, à l'ère des tablettes et des livres électroniques, des programmes télévisés planétaires, de la dématérialisation des œuvres littéraires, de la disparition progressive des journaux sous leur forme papier, sont-ils encore légion ceux ou celles qui lisent ? La question mérite-t-elle d'être posée? Je me souviens d'un de mes séjours en Angleterre où une célébrité en vogue sans retenue aucune déclarait qu'elle ne lisait jamais et qu'elle l'assumait totalement, comme si lire un livre nous renvoyait à un autre âge, une époque ancienne, relevait d'un acte primitif. Depuis, d'autres « people » lui ont emboîté le pas.

Pour ma part, j'ai continué à faire plus d'une centaine de photos sur le sujet car mon instinct de professeur, de bibliophile et tout simplement de lecteur ordinaire ne pouvait se résoudre à l'extinction de « ceux qui lisent ». Mais l'élément déclencheur reste les sondages effectués auprès de mes élèves et des collègues. C'est une réalité : les jeunes lisent de moins en moins de livres. Le simple fait de lire reste pour certains une épreuve, un effort sans intérêt, sans plaisir aucun. Mais loin de moi l'idée d'entrer en croisade en faveur de la lecture, d'ailleurs dans cette bataille, je n'y serai qu'un tout petit grain de sable. Je veux juste partager et faire partager « ma vision » de l'amour du livre, des façons de lire en souvenir des merveilleuses découvertes et magiques moments subtilisés au temps et puis remercier tous ceux (enseignants, amis, parents, voisins) qui ont aiguillonné ma curiosité et empli ma vie de tant d'histoires...


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 « Mathieu Do Duc est enseignant en lycée professionnel et photographe auteur indépendant travaillant comme il dit « pour le Temps qu'il faut ».

Né en 1958 au Vietnam, il vit à Marseille depuis 1965 avec une intermède de quinze ans en région parisienne. Très  influencé par la génération des Street Photographers et des photographes humanistes français, il a démarré la photographie par un travail de 9 années sur les enfants d'une cité HLM de Fresnes, en banlieue parisienne pour lequel il a obtenu une bourse du Conseil Général du Val de Marne. De retour à Marseille, il a, grâce au concours « d'Images Plurielles », édité un livre « Photo-la-graphie moi » rassemblant ses travaux sur les enfants en immersion urbaine.

Du simple passant de la rue aux musiciens de jazz, des enfants aux seniors ici à Marseille ou ailleurs dans les villes du monde, il a à cœur de capter la beauté, parfois la gravité mais toujours la poésie d'un geste, d'un regard, d'une situation de chaque moment de la vie au quotidien qui défile devant son appareil. Révéler ce qui est bien présent sous nos yeux mais que nous n'avons plus de temps de regarder...»

Mon travail s'apparente à celui du pêcheur, comme se plaisait à le dire Robert Doisneau, attendre l'instant de grâce, de magie offert par le hasard à celui qui se donne la peine de regarder mais qui n'attend rien : Etre simplement à l'écoute, prendre le temps des rencontres, accorder son regard sur le souffle, s'immerger dans les bruissements de la vie et aller à l'essentiel ; puis enclencher le bouton comme l'enfant lâche le doigt du père, sans heurt, sans précipitation ni fébrilité comme allant de soi, naturellement pour vaquer à ses occupations d'enfant.

Je reste pour ma part fidèle à l'argentique, et surtout au noir et blanc qui me permet de m'abstraire de la pesanteur tyrannique du temps à laquelle nous assujettit notre société. Le long cheminement de l'image, de la pellicule au papier sensible, me semble-il, relève de la maturation du fruit qui, pour donner le meilleur de lui même, a besoin de lumière, d'eau, de terre, d'attention, et surtout de temps. En prolongeant le délai d'attente, Il m'enseigne la patience, l'acceptation de l'incertitude et m'impose l'humilité. En effet, qui peut affirmer que ce qu'il y a sur le film sera bon, que la photo prise sera « réussie » ou non ? Tel le fruit, on ne peut juger de son goût qu'une fois cueilli et consommé.

Il m'apparait paradoxal de dire que la sensation, le goût de liberté, d'intemporalité de mes images dépend de ce processus, de cette alchimie complexe entre l'œil, le cœur, la lumière, le souffle et le temps qu'il faut pour que le tout s'agence en un seul et même Instant... de magie*(Edouard Boubat).

Et pourtant...

 

 Vernissage le mercredi 9 décembre 2015 à partir de 19:00

Exposition du 9 au 31 décembre 2015

 

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